Situé au large de la Guinée-Bissau, sur la côte ouest, cet archipel peu connu recèle d’une des plus grandes densités d’espèces de l’Atlantique sud.
Une biodiversité inconnue
Grâce à ses côtes majoritairement couvertes de mangrove, qui apportent nourriture et abris aux poissons, et du fait de sa situation proche d’un grand estuaire, les eaux des Bijagos sont extrêmement riches. Plus de 170 espèces de poissons y ont été référencées. Des espèces côtières comme les lutjans, vivaneaux, cobias, carpes rouges, capitaines et nombre de petits poissons de roche ou de vase, ainsi que le « roi d’argent », le tarpon.
Les espèces pélagiques n’hésitent pas non plus à s’approcher des rives pour profiter de la manne alimentaire qu’elles recèlent. On y trouve de très nombreuses carangues (ignobilis, gros yeux, dorée, pompano, etc…), des thonidés comme la bonite, des barracudas, liches, etc…
Pour compléter ce tableau, les requins et raies sont également très présents. Raie pastenague, raie guitare, requins tigre, bouledogue et d’autres espèces inféodées aux milieux côtiers. Enfin, les dauphins et les lamantins, dont les Bijagos sont l’un des derniers refuges, se rencontrent aussi régulièrement. Mais les stars aquatiques des Bijagos sont certainement les tortues. Les cinq espèces vivant en Atlantique, les tortues luth, caouanne, imbriquée, olivâtre et verte, fréquentent couramment ces eaux. Beaucoup s’y reproduisent, et l’archipel est notamment le principal site de reproduction des tortues vertes de tout l’Atlantique. Elles viennent en masse y déposer leurs œufs dans des nids creusés à grand peine sur les plages désertes, de juillet à octobre.
Le projet Entre Deux Rives
C’est cette incroyable diversité qui a motivé le lancement du projet de film documentaire Entre Deux Rives. Porté par les étudiants nouvellement diplômés de la 11è promotion de l’Institut Francophone de Formation au Cinéma Animalier de Ménigoute (www.iffcam.net), ce projet vise à faire découvrir ces milieux si riches et pourtant méconnus, ainsi que les populations qui en dépendent.
Riche d’une culture ancestrale, animiste, vouant un grand respect aux espèces sauvages qu’elles vénèrent tout en les exploitants pour leur survie, ces populations ont su maintenir leur mode de vie malgré les pressions extérieures. Ces traditions impliquent une véritable préservation des richesses vivantes du lieu, non pas par idéalisme écologique, mais grâce à un mode de vie impliquant une gestion raisonnée des ressources, nécessaires à la simple survie.
Mais aujourd’hui, les choses changent. L’autarcie voulue et assumée jusqu’ici se fissure, et les Bijagos souhaitent s’ouvrir au monde extérieur. De nouvelles problématiques apparaissent, et malgré une volonté de conserver une part importante de leur mode de vie, celui-ci ne permet plus toujours de protéger ces îles. Entre Deux Rives nous emmène à cette croisée des chemins, dans un monde qui cherche son équilibre. Entre cérémonies traditionnelles et gestion des parcs nationaux, l’archipel des Bijagos est un exemple concret et actuel de tentative de préservation raisonnée et coopérative de la biodiversité. Le film s’attachera à des personnages emblématiques que sont la prêtresse Okinkha, plus haute autorité des villages, le gardien du parc national qui à choisit d’être le lien entre les populations locales et les administrations, et le guide de pêche qui accompagne les touristes dans ces eaux riches, dans le respect de la ressource. Entre Deux Rives tentera de saisir la pensée de ces représentants sur leurs îles, leur regard sur ces années de transitions, qui seront déterminantes pour l’avenir des Bijagos. Ces personnages seront des guides à la découverte de la vie foisonnante de ces îles.
Cette diversité exceptionnelle est permise par les conditions particulières qu’offre cet archipel. Proche des estuaires de plusieurs grands fleuves Guinéens, les eaux de l’archipel profitent de ces apports massifs de nutriments. Ils alimentent les grandes étendues de mangroves qui bordent les îles. Ces dédales de bras d’eau encombrés de racines de palétuviers offrent un arbi idéal à quelques espèces sédentaires, comme les périophtalmes. Ces petits poissons typiques des mangroves ont la particularité de pouvoir respirer hors de l’eau, et se hissent donc parfois sur la vase où les racines, hors de portée des poissons prédateurs. Mais les racines de palétuviers sont aussi de parfaites nurseries pour de nombreuses espèces, y compris pélagiques. Cette abondance d’alevins attire de nombreux prédateurs qui viennent chasser à marée haute. La mangrove devient un petit monde riche de vie, abritant du plus petits des crustacés aux plus grand des prédateurs, comme le tarpon, une population vivant au rythme des mouvements de marées.
Les zones de plages et les quelques langues rocheuses sont aussi des zones prisées. Les roches abritent toute une vie fixées (éponges, quelques coraux, vers, anémones, etc…) et procurent nombre de caches pour les petits poissons, qui eux-mêmes attirent les prédateurs. C’est le terrain de chasse de la carpe rouge, et des autres Lutjanidés aux couleurs exubérantes. C’est aussi là que se rencontrent les grands mérous, et que viennent chasser les requins gris.
Devant les plages, juste derrière les vagues qui viennent s’y briser, patrouilles les capitaines, les cobias et les liches. Le sable est riches des nutriments venant des fleuves et de la mangrove, et lorsque la houle l’agite, cette nourriture est à la portée des élops et autres poissons proies. Suivent alors les poissons prédateurs. Mais ces plages aux eaux troubles sont aussi le terrain de chasse d’un top-prédateur : le requin bouledogue. Invisible dans ces eaux brassées, il attend la proie trop insouciante dont il pourra se saisir.
C’est toujours ce même schéma de chaîne alimentaire qui se répètent, avec des spécificités propres à chaque lieu certes, mais suivant toujours cette même logique. Et c’est la base de cette chaîne, à savoir la grande quantité de nutriments disponible, qui permet une si grande densité d’espèces à tous les échelons.
Mais les poissons ne sont pas les seuls à peupler les eaux des Bijagos. Dans les lagunes au fond couvert de vastes herbiers, on trouve une des plus grandes populations d’un animal tant chassé qu’il est aujourd’hui grandement menacé : le lamantin. Ce placide mammifère herbivore aujourd’hui protégé était à la fois vénéré et exploité dans les Bijagos. La précédente génération compte dans ses rangs les derniers chasseurs de lamantins. Mais aujourd’hui ils peuvent explorer les côtes en toute tranquillité, les Bijagos sont devenus un sanctuaire pour cette espèce dont l’avenir reste incertain au niveau mondial.
Enfin, la spiritualité des peuples Bijagos a permis depuis bien longtemps de ménager des lieux propices à la reproduction d’autres espèces emblématiques des océans : les tortues. Elles aussi étaient encore chassées il y a peu. Cependant, elles profitent également du statut de certaines îles. Inhabitées et réservées à certains rituels, leurs plages sont des lieux de pontes idéaux pour ces espèces. C’est le cas de l’île de Poilao. Au sud de l’archipel, cette petite île jouit d’un statut très particulier. Le sang ne doit pas y couler. Chasse et pêche y sont formellement prohibées, et simplement y poser le pied requiert l’accord des peuples locaux « propriétaires » de l’île, et le passage par un rituel spécifique. En l’absence de dérangement, avec une présence humaine extrêmement limitée et sans aucune pollution lumineuse, cette île accueille chaque année des centaines de tortues, vertes principalement, qui viennent y pondre leurs œufs. Ajoutés aux autres sites de pontes des Bijagos, Poilao participe à faire de l’archipel le principal site de reproduction des tortues de l’Atlantique.
C’est pour en découvrir d’avantage sur cet archipel exceptionnel par sa culture et par sa biodiversité que l’équipe des 14 cinéastes du projet Entre Deux Rives propose de vous emmener à la découverte des Bijagos. Sa diversité marine et terrestre a engendré un folklore riche et complexe, nourrit aussi par certaines « curiosités » comme la timide loutre à joue blanche, ou les hippopotames d’Orango, seule population de cette espèce connue pour venir parfois s’ébattre en mer.
Entre tradition et modernité, entre faune marine et terrestre, entre savane et mangrove, Entre Deux Rives vous invite à suivre son équipe lors de ses tournages de novembre 2016 et juin 2017.
En partenariat avec Fishipédia, vous pourrez suivre la progression du projet jusqu’à la diffusion du film en avant-première au Festival International du Film Ornithologique de Ménigoute en novembre 2017.
D’ici là, vous pourrez découvrir certaines espèces, les rencontres de l’équipe et le déroulement du tournage sur Fishipédia, ou via le site et la page Facebook du projet.
Facebook : https://www.facebook.com/EntreDeuxRivesBijagos/
Site internet: http://entredeuxrives.wixsite.com/bijagos
Ce projet est autofinancé par les étudiants de l’IFFCAM à travers l’association Les Amis de l’IFFCAM, et vous pouvez participer à son accomplissement grâce au financement participatif sur le site KisskissBankbank : https://www.kisskissbankbank.com/entre-deux-rives–2
L’équipe remercie toutes les personnes qui souhaiteront soutenir le projet, que cela soit financièrement ou par le partage des liens ci-dessus.
A propos de l'auteur
Benoit Chartrer est un membre fondateur et pilote le projet Fishipédia. Sorti d'une formation d'ingénieur en physique, il a progressivement changé de spécialisation en se tournant vers les technologies Web. Passionné de voyage et de biologie, il tient également un compte Instagram dédié à la photographie animalière.